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A
Accomplissement personnel VS Epanouissement personnel, et Développement personnel
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Livres, émissions de radio ou de télé, magazines : elle est partout, l'injonction à s'épanouir, à sourire, à arborer un corps sain pour prouver qu'on dispose d'un esprit sain, qu'on s'est accompli dans sa vie... Pourtant, ces promesses de bonheur* posent un réel problème : elles nous font du mal. En effet, à force de nous soumettre à cette propagande intensive pleine de couleurs et de jingles légers, on nous donne l'impression que le réel est un rêve, et qu'il nous est de fait inaccessible, puisque par comparaison on a l'impression de se débattre dans un cauchemar au mieux déprimant, au pire désespérant. Richesse hors de portée, corps minces ou musculeux qui nous font complexer, audaces qui nous font rougir, aventures qu'on ose à peine admirer en tremblant : on devient une maison hantée par des fantômes qui ne sont rien d'autres que les rêves qu'on nous impose. Des rêves qui se monnayent. Parce qu'on est dans une société de marché* où le commerce* tient la place centrale. Alors on consomme*, puisqu'on nous en somme jusqu'à nous assommer. Tout ça vient d'une confiscation de ces mots qui semblent receler le bonheur* auquel on aspire. L’accomplissement personnel* et l’épanouissement personnel* sont des notions qui semblent très modernes* et très proches, mais ce sont en réalité des visions du monde et de la vie clairement contraires, bien que pas nécessairement inconciliables.
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L’accomplissement personnel* est en réalité un mythe très ancien sur la façon qu’a l’être humain* de s’envisager. En effet, si les religions* renvoient souvent l’humain* à sa modeste condition de serviteur condamné à vivre sa vie en rampant pour mendier sa rédemption et le pardon divin, il arrive souvent que celui-ci cherche à laisser sa trace dans l’Histoire*, à inscrire son nom parmi les étoiles et ainsi déjouer la mort de l’anonymat par l’immortalité de la célébrité. Il doit pour cela accomplir son destin* afin de réaliser une prouesse inégalée et inégalable. Il s’agit donc de s’inscrire dans le récit humain* comme un être d’exception aux yeux du monde et de ses semblables, qu’ils soient contemporains ou à venir. Il faut en mettre plein la vue pour qu'on se rappelle de vous. Ces haut-faits peuvent se concrétiser dans tous les domaines de l’activité humaine : art*, politique*, sciences*, force*… Il s’agit donc ici de relever les défis de son temps pour écraser le reste de la race humaine de son génie* inimitable. Le trait est grossi, mais c’est pour bien faire passer cette idée de quête sociale*, puisque l’accomplissement doit bien donner lieu à un résultat admirable et admiré.
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L’épanouissement personnel*, lui, est davantage le fruit des recherches en sciences* sociales*, mais il n’est pas non plus sans rapport avec des philosophies* antiques* comme l’épicurisme ou l’hédonisme qui postulaient déjà comme essentielle la jouissance au présent, ou même le bouddhisme et la méditation. Il ne s’agit plus de s’illustrer dans le monde par son originalité admirable, mais bien de trouver la paix intérieure, de se sentir bien en soi là où l’on vit. C’est donc une quête moins sociale* qu’intime, et donc quelque chose qui implique d’être à l’écoute de ses besoins, désirs et craintes, en osmose avec les autres et le monde davantage qu’en compétition ou en confrontation.
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Bien sûr, ces deux approches ne sont pas incompatibles, et elles trouvent même dans l’art* et l’artisanat*, dans la politique*, dans la philosophie*, et de manière générale dans toute pratique qui accroît la connaissance de soi et du monde, une convergence évidente : conquérir des accomplissement dans ces domaines permet de franchir des paliers dans la connaissance de soi, mais également de laisser une trace que les autres pourront interpréter, s’approprier, interroger ou admirer.
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En revanche, on assiste depuis quelques décennies à une dictature* de l'épanouissement personnel* en tant qu'accomplissement personnel* : il faut cocher des cases sur une liste de choses à faire et à être. On n'y vante pas ce qui fait du bien : on y impose ce qui doit prouver qu'on est bien. Et on retombe dans le travers compétitif* de l'accomplissement personnel*. Heureusement, de plus en plus, des voix dissonantes se font entendre pour demander et cultiver le temps long*, le low-tech*, l'empathie*... Ce sont ces nouveautés aux racines anciennes qui seront le terreau de l'humanité* meilleure que nous appelons tous de nos vœux.
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Dans ce tiraillement de sens et d'objectifs, le développement personnel* n'est rien d'autre que le chemin qui mène à ces objectifs. Aussi, il est essentiel de comprendre vers quoi l'on tend pour s'appuyer sur les bons outils, les bonnes personnes. Car on n'atteint pas l'épanouissement en recherchant l'accomplissement, pas plus qu'on n'aboutit à l'accomplissement en cultivant l'épanouissement.
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Actifs
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On nomme actifs* d’une part les travailleurs* (salariés*, travailleurs indépendants*, employeurs*, fonctionnaires*...), d’autre part les placements financiers* (actions*, obligations*, assurances-vies* et autres investissements* plus ou moins complexes où l’argent* travaille* en rapportant des dividendes* ou des intérêts*).
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Il est intéressant de noter pour les personnes d’abord la distinction binaire entre actifs* d’un côté, et de l’autre ce qu’on doit bien nommer par opposition les « passifs », dont on ne parle même pas. Il y a là un clivage très ancien qui nous vient de notre héritage gréco-latin. En effet, les castes dirigeantes de la Grèce antique et de l’Empire romain étaient composées de propriétaires* terriens qui faisaient travailler* des esclaves* tandis qu’ils pratiquaient la philosophie* et la politique*. Les romains en ont conceptualisé la distinction entre otium et negotium. Ces riches et puissants seigneurs, délivrés d’un travail* qu’ils jugeaient dégradant, pouvaient s’adonner à la méditation et à la philosophie* qui rapprochent du divin et accroissent la sagesse. L’otium est donc ce temps de liberté que le travail* nourricier ne vole pas à l’esprit, qui peut par conséquent s’élever par la pensée, la réflexion ou la fréquentation des autres et de la nature* ou des arts* – pourtant, aujourd’hui, parce que le monde a été traversé par une révolution* bourgeoise* et prolétarienne*, le travail* est devenu moyen, but et source d’accomplissement personnel*, et l’otium a accouché du mot « oisiveté », qui n’est pas loin d’être la mère de tous les vices (et pas le père, notez). A contrario, le negotium, lui, qui est la négation de ce temps d’épanouissement* de notre humanité, est un temps de travail* forcé, que le corps arrache à l’esprit, où l’on s’avilit à fréquenter l’argent* et se dégrade la chair. On notera au passage que le mot « travail* » dérive lui-même d’un instrument de torture antique, le tripalium. On voit bien comme l’histoire peut changer de regard. Pourtant, le negotium est désormais devenu négoce*, un commerce* noble* et profitable* à tous, car facteur d’enrichissement mercantile.
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Aujourd’hui, donc, fi de la méditation et de tout ce qui élève l’âme : c’est le travail* nourricier et rémunérateur qui fait la valeur de l’humain* dans sa société*. Celui qui n’est pas actif* est un poids pour la communauté*, un nuisible, un profiteur, un parasite qu’il faut cacher, enfermer, anéantir : les enfants dans les écoles*, les chômeurs* hors de la vie civique, les migrants* sous la mer, les retraités* dans les hospices.
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Ainsi, par analogie, les placements financiers* deviennent de l’argent* qui travaille*, comme de bons petits employés* qui ramènent une paie* à leurs propriétaire*. Toujours dans cette vision du monde moderne* matérialiste* et avide de réussite financière*. Ce sont pourtant ces placements qui posent de nombreux problèmes dans notre société. Voir les articles Action*, Bourse*, Capitalisme* et Libéralisme*.
Menu
Action
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Titre de propriété* d’une partie d’une entreprise*, qui ouvre droit à la fois à un siège et une voix au Conseil d’Administration* et à une part des bénéfices* de l’entreprise*, appelés dividendes*, et versés chaque année au propriétaire* de l’action*, appelé actionnaire*.
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Cumuler plusieurs actions* d’une entreprise* permet d’augmenter son emprise sur elle en cumulant les voix et d’augmenter sa part des bénéfices* en cumulant les dividendes*.
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On peut acheter et revendre tout ou partie de ses actions* sur un marché* dédié appelé la Bourse*, et qui présente un certain nombre d’effets pervers qui sont détaillés à l’article qui lui est consacré dans ce dictionnaire.
Antique / Antiquité
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Argent
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Abus de langage venant du fait qu'on frappait la monnaie* dans ce métal parmi d'autres. Pour plus d'informations utiles, voir l'article sur la monnaie*.
Art / Artiste
Artisan / artisanat
Assemblée Générale
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Réunion régulière ou exceptionnelle où les actionnaires* d’une entreprise* se réunissent pour que la direction présente son bilan et ses futures stratégies afin d’obtenir l’accord des actionnaires*.
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Si sur le papier il est sain et démocratique* que les propriétaires* se réunissent pour discuter ensemble des perspectives de leur entreprise* commune et votent à la fois pour les choix stratégiques et l’élection du Président-Directeur Général (PDG)* qui mettra en œuvre ces décisions, en réalité, ce sont les actionnaires* qui possèdent le plus d’actions* qui ont le plus de poids, ce qui donne l’avantage aux plus gros porte-feuilles*, souvent des gestionnaires d’actifs* de type fonds de pension* ou groupes financiers* de spéculation*. Or, ces gestionnaires d’actifs* ont des processus économiques* extrêmement voraces et volatiles, cherchant sans cesse à faire les plus gros profits* possibles, quitte à imposer des politiques* de destruction de l’emploi* (licenciements* économiques*, automatisation*, délocalisations*) et des faillites* d’entreprises* (revente, liquidation…) pour dégager au plus tôt les bénéfices* les plus forts, même s’ils doivent être les derniers que l’entreprise* ainsi vampirisée va faire. Voir la logique économique* qui sous-tend ce mécanisme dans l’article Bourse*.
Assurances
Automatisation
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Voir Mécanisation*.
B
Banque / bancaire / banquier
Bonheur
Bourgeois / bourgeoisie
Bourse
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Lieu physique et fictif où se vendent, se revendent et se re-revendent les parts de propriétés d’entreprises* (actions*) ou des dettes* des États* (obligations*). Existent en parallèle le marché* des devises*, où s’achètent et se revendent des monnaies* nationales, et le marché* des matières premières*, où s’achètent et se revendent... des matières premières*.
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On distinguera deux secteurs différents dans les activités boursières*.
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Il y a tout d’abord le marché* primaire, où les entreprises viennent chercher des investisseurs* (actionnaires*) qui s’intéressent à leurs projets de création ou de développement, en partageant les risques et les bénéfices* (dividendes*). C’est le principe fondamental du capitalisme* : des personnes disposant d’un capital* financier* (argent*) ou matériel (locaux, machines, matériaux...) s’associent pour développer ensemble un projet plus ambitieux que ce qu’ils auraient pu réaliser seuls. Ce faisant, ils partagent le risque d’échec si leur entreprise échoue, mais également ses bénéfices* si c’est un succès. Généralement, les actionnaires* initiaux sont des entrepreneurs* investis qui croient dans leur projet, des hommes et des femmes qui ont à cœur de mener à bien et à terme leur idée, et qui y consacrent une part importante de leur vie et de leur activité. Les actionnaires* sont donc collectivement les propriétaires* de l’entreprise*, et ils s’en partagent la gestion et les stratégies en Conseil d’Administration*, où une action* donne droit à une voix lors des votes décisifs, notamment l’élection du Président-Directeur Général (PDG)* qui joue le rôle de capitaine du vaisseau-entreprise.
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Cependant, derrière ce marché* primaire a priori vertueux permis par la bourse*, il y a le marché* secondaire, où les actionnaires* viennent revendre leurs actions*. Si sur le principe il peut être entendable qu’un actionnaire* revende ses actions* parce qu’il souhaite porter son investissement* ailleurs ou simplement récupérer l’argent* investi, le problème vient du fait que ce marché* secondaire est essentiellement dirigé par l’appât du gain immédiat, dans une course à la spéculation* effrénée qui est une des pathologies principales du libéralisme*.
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En effet, un actionnaire* qui revend son action* la revend à un prix* fixé par la loi* de l’offre* et de la demande*. Ce prix* étant changeant, l’actionnaire* qui ne s’intéresse pas à l’entreprise* elle-même se contente de surveiller l’évolution de la valeur* de l’action* pour la revendre au-dessus du prix* qu’il l’a payée, celui qui l’achète ayant pour optique soit de s’associer à l’entreprise* car il en partage les objectifs, soit de revendre au plus tôt cette action* dès que sa valeur* aura augmenté encore. C’est ce qu’on appelle boursicoter*, ou spéculer*, ou encore jouer en Bourse*. Or, le choix d’acheter une action* plutôt qu’une autre dépend de deux facteurs : la valeur* de revente de celle-ci si l’on projette de s’en séparer rapidement, ou bien la valeur* des dividendes* rapportés par cette action*.
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Et c’est là que le bât blesse. Les actionnaires* étant propriétaires* de l’entreprise*, ils en influencent les stratégies lors des Assemblées Générales* par leurs votes, et en particulier en élisant le PDG* qui servira au mieux leur intérêt immédiat, à savoir l’augmentation des bénéfices* qui seront redistribués en dividendes* aux actionnaires*. Ainsi, le PDG* désigné aura pour mission de dégager au plus vite des marges* bénéficiaires* plus grandes. Hélas, les seuls leviers pour augmenter rapidement les profits* sont soit d’augmenter les prix* des biens* et services* produits, ce qui détournerait mécaniquement les clients*, soit de réduire les coûts* de fabrication en rognant sur la qualité*, ce qui dégrade rapidement l’image de la marque*, et donc la clientèle*, ou en réduisant le coût* du travail* par des suppressions de postes, l’automatisation* du travail* et des délocalisations* afin de faire effectuer le même travail* à moindres frais dans des conditions et par des travailleurs* moins protégés (environnement* et droits* sociaux*). Il n’est pas besoin de faire un dessin : la plupart du temps, c’est la délocalisation* qui est choisie, avec les coûts* sociétaux* et environnementaux* que l’on paie de plus en plus durement, ou bien la dégradation des conditions de travail.
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Augmenter la valeur* réelle d’une entreprise* nécessite d’augmenter la qualité* de ses produits* pour trouver davantage de consommateurs*, ce qui implique d’investir* dans la recherche* et le développement*.
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La bourse* est donc le principal instrument libéral* pour enrichir les actionnaires* aux dépens de l’économie* réelle où les actionnaires* qui spéculent* à court terme provoquent chômage*, faillites*, délocalisation*, destruction environnementale* et explosion sociale*.
C
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Capital / Capitalisme / Capitaliste​
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Le capitalisme* est une organisation économique* assez simple, saine et logique de prime abord. Le mot dérive du latin et désigne la tête : en effet, c’est l’alliance de plusieurs têtes, c’est à dire de plusieurs individus, dans le but d’élaborer ensemble un projet commun.
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Prenons un exemple facile à comprendre. Imaginons que je dispose de 10 000€ d’économies et d’un local inutilisé d’une valeur de 5 000€. Je souhaite monter une entreprise* de couture, car j’ai envie de travailler dans la confection de vêtements. Toutefois, en étudiant mon projet, je m’aperçois que les machines* dont j’ai besoin coûtent 20 000€, et que j’ai besoin d’un camion d’une valeur de 5 000€ pour assurer l’approvisionnement régulier en matières premières et les livraisons aux divers magasins. Deux options s’offrent à moi : emprunter les 15 000€ qui me manquent, mais la banque* me fera payer un intérêt*, mettra ma maison en hypothèque*, ou exigera un remboursement plus rapide que ce que je pourrai peut-être me permettre, ou bien trouver un partenaire intéressé par le projet et disposant à la fois de 10 000€ d’économies et d’un camion, mais il va falloir qu’on s’entende bien, qu’on partage les responsabilités, et qu’on assume autant les risques d’échec qu’on se partagera nos réussites et bénéfices*. Jusque là, de toute évidence, le capitalisme* n’est que l’association d’hommes et de femmes dont les volontés convergent, et dont les moyens sont mutualisés pour entreprendre* des projets plus ambitieux que ceux qu’ils auraient pu accomplir seuls. L’exemple que nous venons de prendre est bien sûr simpliste, mais il permet de se rendre compte de la logique concrète du mécanisme.
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Rien que du bon sens, donc.
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Les rouages se grippent pourtant à deux niveaux : lorsque le capital* s’ouvre à des actionnaires*, et lorsque les entrepreneurs* embauchent des salariés*.
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Lorsque le capital* s’ouvre à des actionnaires*, cela signifie que nos entrepreneurs*, pour développer davantage leur entreprise*, ont besoin de sommes d’argent* dont ils ne disposent pas. Ils mettent alors en vente des actions*, c’est à dire des titres de co-propriété* de l’entreprise*. En général, les entrepreneurs* ne créent pas plus d’actions* que ce qu’ils ont dû investir*, car une action* est un pourcentage de propriété*. Si des entrepreneurs* émettent plus d’actions* que ce que leur capital* personnel vaut, cela signifie que des actionnaires* étrangers à eux disposeront de plus de 50 % de la propriété* de l’entreprise*, et qu’ils perdront ainsi la direction de leur outil de travail et la propriété* réelle de leur bien*, avec tous les effets pervers que cela implique et qui se trouvent développés dans l’article Bourse*.
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Lorsqu’on embauche un salarié*, on loue en réalité la force de travail* d’une personne contre une rémunération : le salaire* dans le secteur privé*, le traitement* dans le secteur public*. C’est le contrat social* mis en place entre l’employeur* et l’employé*, qui détermine la qualité de la justice* sociale* de la relation. On peut imaginer deux extrêmes : l’employeur* qui redistribue à ses employés* la totalité de ce qu’il gagne sans rien garder pour lui ou l’entreprise*, et l’employeur* qui ne redistribue rien à ses salariés*, qui deviennent de fait des esclaves*. Évidemment, la justice* sociale* se situe entre les deux, et c’est là que se trouvent le terrain principal de la lutte des classes* et de la négociation syndicale*, et les principaux travers d’un capitalisme* libéral*, c’est à dire un capitalisme* dérégulé*.
Caste
Charge
Chômage / chômeur
Cité / citoyen / citoyenneté / civilisation
Classe / lutte des classes
Client / clientèle / clientélisme
Commerce
Commun / commune / communauté / communisme
Compétition / compétitivité
Connaissance
Conseil d'Administration
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Groupe des personnes choisies en Assemblée Générale* et validées par les actionnaires* pour mettre en oeuvre la stratégie de l'entreprise*.
Consommateur / consommation / consomm'action
Constitution
Coût
Culture
D
Délocalisation
Demande
Démocratie
Dérégulation
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Le terme « dérégulation* » est un excellent exemple de ce que ce dictionnaire tente de démonter et réparer : un terme positif masquant une réalité négative, comme les expressions « libéralisme* » ou « charge* salariale* ou charge* patronale* ».
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Ce mot suggère que la société* serait entravée par des règles qui seraient autant de carcans limitant les libertés* individuelles*, et donc les droits* au bonheur* de chacun. Or, c’est oublier que ces règles sont en réalité des lois* de fonctionnement social* permettant d’organiser les relations entre les citoyens* de sorte que les droits* constitutionnels* soient respectés par tous et pour tous.
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En effet, la démocratie* en général et le monde du travail* en particulier sont les lieux et la résultante de siècles de luttes sociales* pour obtenir l’abrogation de privilèges injustes de certains et de charges illégitimes pesant sur d’autres, afin d’obtenir une équité* sociale* entre les individus* : c’est l’idée de justice* sociale*.
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Ces règles visées par les politiques* de libéralisation*, de dérégulation*, sont donc en réalité des lois* de protection, et donc des droits* : protection des salariés*, protection de la santé, protection de l’environnement*, protection des paysages, protection des enfants, protection des femmes, protection de la famille… Toutes ces protections sont le fruit de combats* politiques* et syndicaux* menés au fil du temps, et qui cherchent à organiser le monde autour de l’épanouissement* humain*. La dérégulation*, c’est donc la destruction de ces droits* sociaux* afin de mettre l’économie* au centre, et surtout de privilégier le profit* des plus puissants sur les intérêts vitaux et le bonheur* des plus faibles.
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Ce n’est pas un hasard si toutes les politiques* de dérégulation* sont issues de cercles de réflexion* et de formations politiques* copieusement financés par les grandes puissances financières* et économiques* mondiales et les lobbies* à leur solde.
Destin
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Le destin*, la destinée*, sont indissociables d’une foi mystique* ancrée dans un sentiment de tragique : quelque chose préside aux existences, et tout est écrit, décidé, dessiné à l’avance. On peut donc lire les signes avant-coureurs, mais pas se soustraire à ce que ces instances divines ont prévu pour nous. On mérite* ou démérite par essence, par notre lignage*, bien avant notre naissance. On n’a pas de libre-arbitre*. A peine la liberté* d’accueillir ou non cette fatalité avec plus ou moins de soumission*. L’art* regorge de drames fictifs mettant en scène ces combats désespérés contre l’implacable volonté supérieure des cieux, ou au contraire d’émouvants sacrifices volontaires à leurs voies impénétrables.
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Les premières civilisations* ont très vite développé des univers ésotériques pour expliquer ce qu’ils ne pouvaient comprendre ou découvrir par les moyens à leur disposition : leur origine, le sens de leur vie, le fonctionnement du monde. Cette religiosité* s’est structurée un peu partout pour donner lieu à des cultes établis de plus en plus prescriptifs, contraignants, rituels, tyranniques, ce qui a amené à des dissensions, des schismes afin de repenser la religiosité de manière plus libre.
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Dans le monde profane des athées, des intellectuels, en particulier dans la sphère occidentale, le génie* vient élire des hommes et des femmes – mais surtout des hommes – pour les hisser au-dessus du commun : doués de talents hors-norme, ils éclairent le monde de leur enthousiasme créateur inspiré par l’éther ou la chance ou les muses. Là non plus, pas de place pour le libre-arbitre* : on naîtrait talentueux, ou bien dénué de don*. On naîtrait génie* ou gueux, en somme, dans une loterie naturelle de caste où chacun resterait à sa place.
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Bref, toutes ces notions de prédestination ne prennent sens que dans ce cadre de fois, de croyances, et sont largement battues en brèche par les travaux des scientifiques.
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La science* ne tue pas Dieu, elle le remet à sa place : il est cause originelle, s’il doit être, mais la matière obéit aux lois naturelles qui découlent de cette origine, qu’elle soit matérialiste* ou spirituelle*. Les sciences* humaines* en particulier ont éclairé le fonctionnement humain de manière très instructive via les travaux des sociologues*, puis des psychologues* et enfin des neurosciences*. Non, le libre-arbitre* n’existe pas, et nous ne sommes pas tous égaux*, mais cette détermination* et cette inégalité* ne sont pas liées à un phénomène surnaturel, mais au hasard de la génétique* d’abord, fruit des rencontres parentales, puis des milieux* dans lesquels on se construit. Ainsi, à enfants équivalents, le milieu conférera généralement les aptitudes et inaptitudes parentales. La détermination* des êtres n’est pas magique, mais sociale* et psychologique*, avec une incidence de la génétique*, bien sûr, lorsque des handicaps avérés s’en mêlent.
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Dans un monde traditionnellement machiste et aristocratique, nos sociétés ont éduqué les classes supérieures, et parmi elles surtout les hommes : c’est donc un héritage* culturel* qui se forme et qui va nourrir génération après génération les enfants qui naissent dans une famille. Bien sûr, il suffit d’un accident de parcours, mésalliance, rupture, traumatisme ou handicap, pour que cet héritage* soit dilapidé et que les enfants doivent s’en passer. C’est une mécanique bien huilée : les catégories les moins formées deviennent les moins capables de comprendre, de s’organiser, de se défendre, de décider, ce qui légitime de fait leur écartement du pouvoir*, qui arrête la marche du monde un peu plus à leurs dépens. C’est ce cercle vicieux qui nourrit le sexisme*, le racisme*, l’homophobie*, et de manière générale tous les systèmes de castes* ou de discrimination*.
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Oui, le facteur génétique* est pertinent, mais il y a bien des mécanismes de compensation ou de neutralisation qui peuvent impacter la manière dont l’individu se développe, et se fonder sur une répartition des individus par le seul prisme de la génétique* mènerait davantage aux dérives eugénistes* qu’à une science* de l’épanouissement personnel*. C’est le fonctionnement des relations familiales* et sociales* qui va définir la construction de l’individu*, et c’est un ensemble d’interaction très complexes. Voilà pourquoi il est essentiel dans une société* qu’il existe des institutions dont c’est le rôle et qui a les moyens de compenser les inégalités* : école*, santé*, retraite*, justice*, police*… Ce sont ces services publics* qui garantissent un droit à l’égalité*, mais égalité* n’est pas équité*, et il faut accompagner davantage celles et ceux dont les besoins ou incapacités sont les plus grands.
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C’est au prix d’une société* équitable* que les individus* accéderont à l’égalité* de fait et seront en mesure de faire société* ensemble. A défaut, on en reste à une organisation dissymétrique où les plus puissants exploitent la plus grande partie de la population, chaque couche se défendant du déclassement en écrasant le groupe moins heureux qui le suit. C’est en cela que le libéralisme* et la dérégulation* qu’il présente comme libération de l’individu sont à la fois tentants et dangereux : on croit se donner du pouvoir* contre les concurrents* de son groupe social*, et l’on ne fait que se désarmer face à ceux qui tirent profit de nos divisions.
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Pour en revenir à notre problème de destin*, qui n’est qu’une justification facile au fatalisme, c’est un masque que l’on choisit de porter et qui nous empêche de voir les carrefours qui s’offrent à nous. Il n’y a qu’en permettant à chacun de comprendre comment il fonctionne et pourquoi qu’il pourra se libérer de ses déterminismes* et exercer son libre-arbitre*.
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La connaissance* est un pouvoir* : ceux qui cherchent à la fragiliser ou à la confisquer ne nous veulent pas du bien.
Détermination / déterminisme
Dette
Développement économique, social, personnel
Devise
Dictature
Discrimination
Dividendes
Droit
E
Ecole
Economie
Egalité / Equité
Empathie
Emploi / employé / employeur
Entreprise / entrepreneur
Environnement
Epanouissement personnel
Esclavage / esclave
Etat
F
Faillite
Famille
Finance / financier
Fonction publique / fonctionnaires
Fonds de pension
Force
G
Génie / génétique / eugénisme / don
H
Héritage
Histoire
Homosexualité / homophobie
​
Humain / humanité
Hypothèque
I
Indépendance
Individu / individualisme
Industrie / industriel
Intérêt
Investir / investissement / investisseur
J
Justice
L
Libéral / libéralisme / liberté/ libre-arbitre
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Le terme « libéralisme* » est un excellent exemple de ce que ce dictionnaire tente de démonter et réparer : un terme positif masquant une réalité négative, comme les expressions « dérégulation* » ou « charge* salariale* » ou « charge* patronale* ».
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Le libéralisme* est une foi mystique selon laquelle une entité magique nommée « Main invisible » va permettre d’organiser le meilleur des mondes à condition qu’on supprime toutes les règles et toutes les lois mises en place pour empêcher les plus puissants d’exploiter les moins puissants (cf. Dérégulation*).
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Conçu au XVIIIe siècle par certains philosophes* des Lumières* (Adam Smith, David Ricardo) pour contester les monopoles* commerciaux octroyés par le roi à ses amis, et donc au début vu comme une manière de contrer le favoritisme royal en donnant la liberté à tout commerçant de mener les affaires de son choix sans subir la justice du roi, ce dogme a vite montré ses limites. En effet, si l’abolition des privilèges et de la monarchie ont permis aux financiers* et industriels* de commercer sans entraves et d’accumuler des fortunes colossales, ce qui a ouvert la voie à une période de progrès techniques* encouragés par le capitalisme* et les sciences* modernes, cela s’est fait en même temps que l’élévation du niveau d’instruction des populations, rendu nécessaire par l’utilisation de machines et de processus de production plus complexes, et que le développement des sciences sociales (sociologie*, psychologie*), ce qui a mis en lumière l’injustice sociale* d’un monde divisé entre une classe dirigeante* qui domine les choix politiques* et économiques* en tirant ses profits* et privilèges de l’exploitation du travail de la classe laborieuse*, qui se voit de son côté limitée dans l’exercice de ses droits par la pression de la classe dominante sur son revenu*, sur ses conditions de travail* ou sur son licenciement*.
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Le libéralisme n’est donc plus une force de libération des énergies de tous par la simple logique d’accumulation du capital*, qui fait que plus on est riche et plus on peut entreprendre des projets qui nous enrichissent et influencent les politiques par le lobbying* ou la compromission directe ou indirecte, mais une tyrannie* de quelques-uns au détriment de tous les autres et de l’environnement*, comme le constatent tous les observateurs du monde. L’argument du ruissellement* et la promesse d’une régulation automatique des marchés* pour peu qu’on les libère de toute contrainte demeurent des vues de l’esprit, des mythes contredits par les études, des fantasmes philosophiques qui tiennent plus de la foi mystique que d’une réalité observable.
Licenciement
Lignage
Lobby / lobbying / lobbyiste
Loi
Lumières
Marché
Marge
Marque
Matérialisme / matérialiste / matière
Mécanisation
Mérite
Migrer / migration / migrant
Milieu
Moderne / modernité
Monnaie
Monopole